« Qu'ont gagné les États-Unis s'ils ont perdu la
bonne opinion de l'humanité ? » s'interroge un groupe de travail du
Council on Foreign Relations (CFR) chargé d'élaborer une stratégie qui puisse revigorer
la « diplomatie publique » états-unienne après la campagne d'Irak.
Le groupe de travail part du constat, sondages à l'appui, que les populations
étrangères ont une opinion de plus en plus négative des États-unis et de leur
politique. Non seulement, cette détérioration de l'image est de nature à générer de
l'insécurité sur le sol états-unien (menace de terrorisme), mais elle suscite
l'inquiétude des gouvernement alliés. Il en résulte une perte d'influence diplomatique
et une une diminutions de la marge de manoeuvre de Washington sur la scène
internationale.
Pour réponse à cette situation qui se détériore, le groupe de travail du CFR appelle
le gouvernement à employer la diplomatie, la puissance économique, la puissance
militaire et la diplomatie publique.
Désignée dans d'autre pays sous 'appellation « propagande », la diplomatie
publique (public diplomacy) vise à « promouvoir
l'intérêt national et la sécurité nationale des États-Unis en comprenant, informant
et influençant les populations étrangères » (définie
ainsi par l'United States Information Agency).
Au fil du rapport, la définition de la diplomatie publique se rapproche d'une forme de
marketing appliquée aux relations internationales. Si une décision politique
états-unienne est réprouvée par l'opinion publique mondiale, c'est qu'elle n'a pas
été suffisamment bien expliquée, ou mal mise en valeur. Par exemple, plutôt que de
rejeter en bloc le protocole de Kyoto et le Tribunal Pénal International, le CFR estime
que les États-Unis auraient dû proposer des amendements ou des contre-propositions.
Même inacceptables pour les autres parties, de telle propositions auraient permis de
véhiculer une image plus positive, plus constructive.
Le CFR émet des recommandations :
Ne plus recourir à la diplomatie publique a posteriori, pour
« vendre » aux opinions étrangères les positions états-uniennes, mais faire intervenir des spécialistes de la communication
dès la prise de décision politique.
Renforcer la coordination de la diplomatie publique au sein
de l'administration, sur le modèle de l'Office of Global Communication créé en janvier
2003 pour coordonner les propagandes de
guerre de Londres et Washington (lire à ce sujet Le Royaume-Uni et les États-Unis
font propagan de commune).
S'appuyer d'avantage sur le
secteur privé pour véhiculer les points de vue des États-Unis,
notamment sur les entreprises de technologie, d'audiovisuel, de communication, et de
recherche en marketing. Elles constituent un vecteur plus souple pour diffuser les
positions états-uniennes que les communications officielles, contraintes à une certaine
formalité.
Recruter plus de
« messagers de l'Amérique » à l'étranger, tels que des religieux, des
journalistes, animateurs et relais d'opinion qui ont toujours plus de crédibilité que
des diplomates (c'est-à-dire les corrompre).
Le CFR cherche des moyens de « capturer les coeurs et les
esprits » des populations étrangères en appliquant le credo libéral de la
communication et de la publicité à la politique internationale. Mais ce
« marketing politique » peut-il restaurer l'image des États-Unis comme pays
porteur de valeurs démocratiques alors que sa politique étrangère tend à démontrer le
contraire ?
Dans ce même temps, Javier Solana, haut représentant de l'Union
européenne, profite du débat sur la réforme de l'ONU pour exposer sa vision du rôle
international de l'Europe. Elle n'a pas changé depuis l'époque où il était secrétaire
général de l'OTAN et représentait les intérêts de Washington. Ainsi, il explique dans
le quotidien Le Monde que l'Union
européenne doit élargir sa zone de sécurité (comme l'OTAN vient de la faire), agir
militairement lorsque les résolutions de l'ONU sont bafouées (comme les États-Unis l'y
invitaient face à l'Irak, mais pas face à Israël), et s'engager préventivement pour
contrer les menaces (comme les États-Unis le souhaiteraient face à la Syrie et l'Iran).
Dans le même quotidien, Alain Lipietz et Daniel Cohn-Bendit (Vert) se font les avocats du
projet de Constitution européenne. Aux
altermondialistes, ils expliquent que l'Europe n'est pas une étape dans la globalisation
(!), mais une parade à la mondialisation (!). Pierre Moscovici (PS) poursuit leur
plaidoirie dans Libération. La Constitution doit être adoptée parce
qu'elle permettra à l'Union de fonctionner à 25. Aussi talentueuses que soient ces
contributions, le fait de n'avoir pour seuls arguments de vente d'une constitution,
qu'elle n'est pas dangereuse et permet de fonctionner laisse pantois.
La loi fondamentale de l'Union européenne devrait donc n'être
qu'une simple règle du jeu applicable entre dirigeants et non pas l'expression d'un
contrat social représentatif de tous les citoyens européens.
transmis par Reseau Voltaire |