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30 Juillet 2003

Communiqué de la Commission des droits de l'homme de l'ONU

La lutte contre le terrorisme érode les droits de l'homme notamment aux USA

30.07.2003 - (extraits) La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme de l'ONU a poursuivi ce matin son débat général sur la question des violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris la politique de discrimination raciale et de ségrégation dans tous les pays, en particulier dans les pays et territoires coloniaux et dépendants. Plusieurs experts ont évoqué la nécessité d'assurer le respect des droits de l'homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

... Il a aussi été recommandé que la Sous-Commission puisse se prononcer sur toutes les questions qui la préoccupent, surtout dans une conjoncture internationale qui a ébranlé la crédibilité des Nations Unies. Un autre expert a rappelé que nombre de mécanismes spéciaux et de procédures thématiques proviennent d'initiatives lancées par la Sous-Commission, regrettant que la Sous-Commission soit entravée dans son action par son organe de tutelle.

... Des experts se sont inquiétés de l'érosion des droits civils et politiques dans certains pays sous couvert de lutte contre le terrorisme et estimé que la Sous-Commission avait sans doute un rôle à jouer dans la formulation de principes directeurs sur les droits de l'homme et les mesures antiterroristes. Un membre de la Sous-Commission a en outre exprimé sa préoccupation devant le nombre croissant d'incarcérations dans le monde « dit libre », soulignant qu'il semble y avoir plus de prisonniers aux États-Unis que dans tout autre pays, y compris la Chine.

...Une experte s'est pour sa part inquiétée que, dans un monde à deux vitesses, il semble y avoir des valeurs pour les riches et d'autres pour les pauvres. ... Les représentants d'ONG ont notamment appelé l'attention sur la situation en Iraq, en République populaire démocratique lao et au Jammu-et-Cachemire, ainsi que sur les mesures prises par les États-Unis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

(Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme 55ème session 30 juillet 2003 Matin )

Suite du débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans tous les pays

...M. MALIK OZDEN (Centre Europe-Tiers monde, CETIM) a déclaré que les États-Unis, qui se proclament champions de la démocratie, des libertés individuelles et des droits humains, ne cessent de surprendre par les actions illégales du gouvernement de Georges W.Bush. En effet, depuis les attentats du 11 septembre 2001, qui sont à déplorer et ont été déplorés par tous, les États-Unis sont en marge de la légalité à travers les actes suivants : agression de l'Afghanistan sous couvert de la légitime défense ; violation des droits de la défense, du principe de la présomption d'innocence et des conventions de Genève concernant les prisonniers présumés talibans et incarcérés à Guantanamo (les autorités des États-Unis s'apprêtent à appliquer le décret du 13 novembre 2001 signé par le Président Bush permettant la création d'une juridiction militaire d'exception, contre six détenus qui seront traduits devant une commission militaire) ; violation des droits des migrants sous couvert de la lutte contre le terrorisme ; agression contre l'Irak au motif fallacieux d'une menace constituée par la détention d'armes de destruction massive ; la poursuite et le durcissement de l'embargo illégal contre Cuba ; impunité, devant la Cour pénale internationale (CPI), des ressortissants des États-Unis agissant dans le cadre des opérations des Nations Unies ; le chantage et la répression contre les États qui ont refusé de signer un accord bilatéral de non-extradition des ressortissants américains devant la CPI. Force est de constater que la majeure partie de ces actes, bien qu'ils contreviennent à la Charte des Nations Unies et au droit international, ont été « légalisés » par le Conseil de sécurité, a souligné le représentant du CETIM.

...M. LAZARO PARY (Mouvement indien « Tupaj Amaru ») a rappelé que chaque jour, des dizaines d'Iraquiens sont victimes de la puissance occupante...  L'ancien inspecteur en désarmement Scott Ritter, répondant dans le journal suisse Le Temps à une question demandant pourquoi les Américains n'avaient toujours pas trouvé ces armes, a répondu : « Tout simplement parce qu'il est impossible de trouver quelque chose qui n'existe pas », « on ne détruit pas des armes de destruction massive sans laisser de traces ». La guerre contre l'Iraq pâtit d'un manque de légitimité internationale et n'a aucun fondement juridique ni aucune justification morale. L'offensive anglo-américaine révèle la véritable architecture sur laquelle repose l'ordre juridique international issu de la seconde Guerre mondiale, les prérogatives du Conseil de sécurité ayant été usurpées pour transformer les Nations Unies en simple institution humanitaire dépourvue du rôle politique qu'elle devrait jouer.

...La résolution 1483 du Conseil de sécurité confère les pleins pouvoirs aux puissances occupantes en Iraq et reconnaît l'occupation étrangère d'un pays indépendant et l'appropriation illégale de ses ressources naturelles ; en un mot, cette résolution légitime ce qui est illégitime et elle est en claire contradiction avec la résolution 1514 (XV) de l'Assemblée générale en date du 14 décembre 1960 , qui exige la fin du colonialisme.

...M. IMTIAZ HUSSAIN (Pakistan) a regretté que certains mouvements de libération soient dénoncés comme terroristes alors que le terrorisme d'État se pratique sans que ses auteurs soient tenus pour responsables au plan international. Il a jugé déplorable que les événements tragiques du 11 septembre 2001 servent d'excuse à certains pour intensifier la répression et porter atteinte à la liberté d'opinion.

...M. EMMANUEL DECAUX, expert de la Sous-Commission, a rappelé que le droit international vaut pour tous et que nul ne saurait impunément échapper à la loi commune, en raison même du poids de l'exemple et de la force des précédents. La lutte contre le terrorisme, aussi légitime qu'elle soit, ne saurait échapper aux principes du droit international, sur le plan externe, comme aux impératifs de l'État de droit, sur le plan interne, a-t-il souligné. Il a affirmé que le droit international a connu cette année un grand progrès, avec la création de la Cour pénale internationale... Pendant toute la crise récente, a-t-il poursuivi, les débats passionnés du Conseil de sécurité ont tourné autour d'armes de destruction massive qui restent introuvables et non autour des violations massives des droits de l'homme commises par le régime depuis des années. ... pas plus que la paix ne se résumait au statu quo, la libération du peuple iraquien ne saurait se résumer à un protectorat étranger, a-t-il souligné.

M. Eide, expert ,   fait observer que le monde libre n'est pas aussi libre qu'on le croit généralement. Outre le traitement des prisonniers à Guantanamo, il s'est inquiété du nombre croissant d'incarcérations dans le monde dit libre. Il semble qu'il y ait plus de prisonniers aux États-Unis (deux millions au total) que dans tout autre pays, y compris la Chine, a précisé M. Eide. Il s'est par ailleurs inquiété du nombre d'enfants vivant dans la pauvreté extrême aux États-Unis, non pas parce que ce pays serait pauvre mais parce qu'il ne tient pas suffisamment compte des droits économiques, sociaux et culturels. M. Eide a rappelé que les États-Unis n'ont toujours pas ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant. Il a par ailleurs dénoncé les efforts déployés dans certains pays afin d'assurer l'impunité de politiciens corrompus.

... MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a rappelé que les droits de l'homme relèvent essentiellement d'une question de sécurité : sécurité de la vie, sécurité alimentaire, sécurité physique (contre la torture), sécurité sociale, sécurité de l'identité. Chaque jour, des violations flagrantes de toutes ces sécurités sont perpétrées.

...Mme Hampson a souligné que lorsque l'on aborde les mesures antiterroristes, il faut réfléchir à leur contenu et à la manière dont elles sont appliquées et ont été adoptées. Certains États ont adopté des lois spéciales pour contrer le terrorisme, a rappelé Mme Hampson. Mais parfois, ce que l'on entend par terrorisme reste flou et il arrive que la législation autorise la détention arbitraire ou le gel abusif d'avoirs. ... les nouvelles lois se sont heurtées à peu de résistance, que ce soit aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Indonésie, par exemple.

.. II y a actuellement à l'état de projet aux États-Unis, les détenus ne seraient même plus en mesure de faire savoir à un avocat ou à un proche qu'ils sont détenus, a averti Mme Hampson. Toute détention qui ne serait pas officiellement confirmée devrait être traitée comme une disparition, a-t-elle estimé. Elle a en outre fait observer qu'au Royaume-Uni, un certain nombre de personnes suspectées d'implication dans des activités terroristes sont détenues qui n'auraient pas pu être détenues si elles avaient été britanniques. Les conditions de détention à Guantanamo sont inhumaines, a par ailleurs rappelé l'experte, soulignant que si les personnes détenues sur cette base venaient à être jugées, ce qui est loin d'être acquis, elles le seraient par une commission militaire n'offrant pas les garanties offertes à tout citoyen jugé aux États-Unis et violeraient les éléments non-dérogeables du droit à un procès équitable.

Aucune personne ne doit être extradée vers un pays où elle encourt un risque d'être détenue dans des conditions inhumaines, d'être détenue sans procès équitable ou d'être condamnée à la peine capitale, a rappelé l'experte. À cet égard, elle a rappelé que les Philippines, l'Indonésie, le Yémen, le Pakistan, l'Afghanistan, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Bosnie-Herzégovine et bien d'autres pays figurent au nombre de ceux qui ont transféré ou envisagent de transférer des ressortissants ou des non-ressortissants à la juridiction des États-Unis.

Mme Hampson a fait observer que l'Union européenne et les États-Unis négocient des mesures de coopération judiciaire qui s'inscrivaient spécifiquement, à l'origine, dans le contexte du terrorisme mais qui sont désormais simplement baptisées « coopération dans le contexte d'activités criminelles ». Ces mesures sont en train d'être négociées et adoptées dans le secret et ne seront rendues publiques que lorsqu'elles constitueront un fait accompli, a déclaré Mme Hampson. ...La prix de la liberté, c'est la vigilance permanente ; or la Sous-Commission n'est actuellement pas vigilante, a conclu Mme Hampson.

...Mme Frey a fait valoir que, pour parvenir à l'éradication de la torture, la communauté internationale doit veiller à l'application du droit international interdisant la torture. Elle a estimé que l'engagement des Nations Unies n'était pas suffisant face au défi à relever, car la responsabilité de prévenir la torture repose sur le Comité contre la torture, qui ne se réunit que deux fois par an pendant deux semaines, et sur le Rapporteur spécial, le seul d'ailleurs qui ne dispose pas d'un personnel suffisant.... Il importe que la communauté internationale établisse des institutions plus solides, d'autant plus que la lutte contre le terrorisme a accru le risque de recours à la torture dans le monde entier, a-t-elle déclaré. Elle a illustré son propos en prenant l'exemple des conditions d'interrogatoire subies par les détenus soupçonnés de terrorisme par les autorités des États-Unis. Elle a précisé que des méthodes similaires à celles utilisées par les États-Unis avaient été jugées contraires au droit international par le Comité contre la torture.

MME FLORIZELLE O'CONNOR, experte de la Sous-Commission, a relevé que le sentiment ressenti dans le monde entier est qu' il y aurait une justice et des droits de l'homme à deux vitesses, pour les riches d'une part et pour les pauvres de l'autre. Il semble qu'il y ait même une série de valeurs pour les riches et une autre pour les pauvres, a-t-elle insisté. La Sous-Commission parle d'indépendance, de droit de l'homme, de droit à l'éducation, par exemple, mais on peut s'interroger sur la réalité de ces droits à la lumière de certaines conditions qui accompagnent certains accords commerciaux, a poursuivi Mme O'Connor. Certains pays se prétendant champions en matière de droits de l'homme entendent mener le reste du monde dans ce domaine alors que les mesures qu'ils prennent ne manquent pas de nous interpeler, a ajouté l'experte. Dans un tel contexte, il semble difficile d'empêcher d'autres pays de prendre des mesures similaires, a-t-elle souligné.

M. Soo Gil Park a souligné le rôle pionnier des Nations Unies dans l'élaboration d'un cadre juridique international relatif aux droits de l'homme. Toutefois, il a regretté que ce rôle ait été mis en cause depuis les événements tragiques du 11 septembre 2001. Il a notamment regretté l'érosion des droits civils et politiques dans certains pays sous couvert de lutte contre le terrorisme et s'est inquiété du signal envoyé par la guerre en Iraq sans l'aval des Nations Unies.

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