Le Lawyer Committee For Human Rights publie un important rapport sur
l'érosion des protections des droits humains aux États-Unis de l'après 11 septembre.
Au-delà d'une simple énumération des atteintes aux libertés, le rapport met en
évidence une transformation profonde de la législation
et des politiques états-uniennes. Ainsi que le déclarait le vice-président Dick Cheney
peu après les attentats, « de nombreuses mesures que nous avons
été obligé de prendre vont devenir permanentes dans la vie américaine » et
vont constituer une « nouvelle normalité » reflétant « une compréhension du monde tel qu'il est ». De fait,
constate le Lawyer Committee For Human Rights, deux ans après les attaques terroristes,
il n'est plus possible de voir ces changements comme de simples mesures d'exception
s'inscrivant dans une stratégie d'urgence à court terme. Le
gouvernement s'est fondamentalement éloigné des principes garantissant la liberté
dans la société états-unienne, formalisés par la Constitution.
Le rapport déplore la mise en place d'institutions
extra-judiciaires tels que le camp de détention et les commissions
militaires de la base militaire de Guantanamo. Non seulement la détention et le jugement
des prisonniers échappent à toute possibilité de contrôle civil, mais les charges
suffisantes pour y transférer une personne sont floues : le Département de la
Justice doit fournir « des preuves » que cette personne est un
« combattant ennemi » (cette catégorie n'ayant
pas été définie dans la législation). De plus, sans explications,
certaines personnes suspectées de terrorisme sont traitées comme « combattants
ennemis », donc pris en charge par des commissions
militaires, alors que d'autres sont poursuivies devant des tribunaux
civils. Cela contrevient à la règle constitutionnelle qui veut que la loi soit
appliquée de la même façon à tous.
Dans le domaine du respect de la vie privée, le gouvernement continue de défendre l'USA Patriot Act qui autorise le FBI à accéder secrètement et
sans motif précis aux données personnelles des citoyens états-uniens
tels que l'historique des consultations en bibliothèque, les dossiers médicaux et
scolaires, les connections à internet, les communications téléphoniques et les
informations bancaires. L'USA Patriot Act qualifie de
« crime » le fait de révéler que le FBI à recherché ce type d'information,
ce qui rend impossible l'estimation quantitative de ces enquêtes secrètes.
L'opacité croissante de l'action gouvernementale est également pointée par le Lawyer
Committee For Human Rights. Comme indicateur de cette tendance, il mentionne la hausse de
14 % du nombre de classifications de documents officiels en 2002 alors que les
déclassifications sont à leur niveau le plus bas depuis sep t ans. Une nouvelle norme
facilite la classification d'informations par des membres du gouvernement. Il en résulte un accès plus difficile pour les citoyens états-uniens aux
informations officielles.
Les États-Unis, dont la force vive a historiquement été constituée par l'immigration,
mènent désormais une politique de méfiance à l'égard
des immigrés, considérés comme une menace à la sécurité nationale.
Peu après le 11 septembre, le Département de la Justice, a déployé d'énormes moyens
pour la surveillance et la détention d'étrangers en ciblant dans certains cas les
ressortissants de pays arabes, musulmans et d'Asie du sud. Mais si ces mesures ont
révélé une suspicion systématique envers les étrangers
elles n'ont pas renforcé la sécurité des citoyens états-uniens. Sur les 1200 personnes
ayant été arrêtées et détenues dans le cadre de l'enquête sur le 11 septembre, 762
le furent sur la base de violations aux lois sur l'immigration.
Le Lawyer Committ ee For Human Rights examine aussi les conséquences de la nouvelle norme
politique états-unienne sur la scène internationale. Elle permet aux gouvernements
critiqués pour leur non-respect des droit de l'homme de justifier leurs actions comme
relevant de la « lutte contre le terrorisme ».
Alors que cette nouvelle norme de la politique états-unienne est loin
de garantir une amélioration de la sécurité des citoyens, conclut le
Lawyer Committee For Human Rights, elle se solde par un coût disproportionné en terme de
libertés individuelles et collectives et éloigne progressivement le pays d'un État de
droit.
transmis par Réseau Voltaire |