Tom Ridge, le secrétaire
états-unien à la Sécurité de la Patrie (Homeland Security), a annoncé, mercredi 19
février, le lancement d'une grande campagne intitulée « Ready
campaign » (« Soyez prêt »). Organisés en
trois parties, les documents (sites internet, brochure) invitent les États-uniens à se
préparer à une éventuelle attaque terroriste. Le lancement de cette campagne intervient
peu après le déclenchement, par le gouvernement, de l'alerte orange de « menace
terroriste ».
Dès l'introduction, le lecteur est conditionné par l'emploi des mots « terrorisme »,
« armes biologiques, chimiques, nucléaire, radiologiques ».
Le caractère inattendu d'une attaque est mis en avant pour suggérer l'urgence à s'y
préparer.
Afin d'impliquer le public ciblé dans une logique paranoïaque, celui-ci est appelé dès
à présent à effectuer des actes concrets de préparation tels que :
se procurer des fournitures d'urgence (masques, piles,
radio
) ;
planifier, en famille, un plan de communication
d'urgence ;
parler à ses voisins et collègues, identifier ceux qui ont
des compétences médicales ou un groupe électrogène ;
acquérir le nécessaire pour improviser une chambre
étanche.
Sans réellement fournir d'indications précises sur la conduite à tenir en cas
d'urgence, le fascicule insiste sur la nécessité d'agir individuellement, même en
posant des actes anodins. Le ressort psychologique utilisé ici est celui de l'implication
physique qui justifie a posteriori la conscience de la menace.
Agissant pour se protéger, l'individu se persuade de la réalité du danger, et cesse de
s'interroger sur son bien-fondé. Il se mobilise lui-même.
D'autre part, l'un des leitmotivs de la campagne est « le terrorisme
nous force à faire un choix : avoir peur ou être prêts ». En d'autres
termes, pour s'affranchir de l'angoisse qui l'étreint, le citoyen doit renoncer à la
critique et se conformer aux instructions des autorités.
Cette dialectique est classiquement utilisée pour contraindre des individus à s'enrôler
dans un combat qui leur répugne : c'est un devoir moral d'attaquer préventivement
avant de voir sa famil le massacrée par un adversaire. Ici, constituer des stocks de
nourriture et calfeutrer sa maison signifie se préparer à une éventuelle agression des
États-Unis par l'Irak, laquelle justifie une attaque préventive de celui-ci.
Le site
www.ready.gov
Le fascicule « Get ready
now » (Pdf, 220 Ko)
L'échelle de
« menace terroriste » du département de Sécurité de la Patrie
« Les renseignements du peuple »
The people's intelligence
Christian Science Monitor
(États-Unis)
Larry Seaquist est un ancien
capitaine de vaisseau de l'US Navy et
stratège au Pentagone.
Il a été conseiller sur les approches créatives à la prévention des conflits du
directeur général de l'UNESCO
(1995-1999). Il est président du Strategy
Group.
Alors que le monde du renseignement n'a jamais été aussi
éloigné de nous, l'interprétation des informations issue du renseignement est devenue
un élément essentiel de la citoyenneté. Sans cette capacité de décryptage, on ne peut
pas juger les
preuves de Colin Powell ou la dernière cassette de Ben Laden.
Le monde du renseignement alimente les militaires et les politiques en informations, mais
celles-ci sont interprétées selon les besoins des récipiendaires et seront plus
utilisées pour nous persuader que pour nous informer. Si on ajoute à cela la tendance des
hommes politiques a créer de faux documents de renseignements pour leur propagande,
on constate que le public est en plein brouillard.
Il est donc temps qu'une organisation indépendante puisse collecter les informations
issues du renseignement pour les transmettre au public afin que les citoyens puissent
être vraiment informés et réagir aux menaces.
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