Il ne fait pas bon critiquer l'industrie
pharmaceutique sur les antennes de ... Radio-France (!)
"Voilà quelques jours, le romancier Martin Winckler a eu la mauvaise surprise
d'apprendre que ses chroniques scientifiques «Odyssée», diffusées sur France Inter
depuis la rentrée 2002, allaient rendre l'âme... Winckler s'est fait viré pour avoir
critiqué, dans sa chronique du 15 mai, les labos pharmaceutiques."Quand on a accès
au savoir, que faut-il en faire ?
Chronique du 7 Juillet 2003 « Odyssée » c'est fini. Je pensais assurer ma chronique
jusqu'au 11 juillet, mais le 4 juillet, la directrice adjointe de France Inter (JL Hees
lui-même était beaucoup trop occupé pour me parler...) m'a annoncé assez brutalement
que la chronique faite le matin même était la dernière. (Motif invoqué par le
directeur de France Inter : "Je ne voulais pas que vous me fassiez une chronique
médicale"...) Je n'ai donc pas pu traiter les sujets annoncés ces derniers jours
sur le site, et je ne pourrai pas saluer les auditeurs. Vous aurez noté que personne n'a
fait de chronique à ma place ; en passant du Gainsbourg, on a signifié délicatement aux
auditeurs que j'avais purement et simplement été viré de l'antenne...
C'est donc à vous, les internautes, que je confie le soin de diffuser ce message, en
particulier à celles et à ceux qui appréciaient Odyssée mais n'ont pas accès au net.
Je ne voulais pas vous quitter sans vous dire que pendant ces neuf mois, j'ai pris
beaucoup de plaisir à vous retrouver en esprit chaque matin, et que, surtout, j'ai
beaucoup appris. Et puis, ayant pu m'exprimer avec une totale liberté pendant ces trois
minutes quotidiennes, et donner dans la mesure du possible la parole à des citoyens qui
ne l'avaient pas, je reste convaincu que la liberté de parole dépasse - et de très loin
- n'importe quelle fonction hiérarchique. Neuf mois de parole sans entrave, ce n'est pas
rien. Et je souris en particulier à la pensée des migraines que j'ai dû provoquer
chaque fois que j'étrillais l'industrie pharmaceutique entre deux messages triomphants
des entreprises du médicament.
Merci aux maisons d'édition, revues et associations qui m'ont envoyé leurs
publications et leurs bulletins d'information. Je suis heureux d'avoir pu contribuer à
faire connaître certaines de leurs productions. Merci, évidemment à tous ceux - des
archéologues aux praticiens de Linux en passant par les personnes concernées par la
surdité, la dyslexie et bien d'autres situations humaines - qui m'ont écrit pour
m'envoyer des réflexions, des informations que je n'aurais pas pu trouver seul, ou
simplement des encouragements - ils m'ont été d'un grand réconfort et justifient
pleinement le travail accompli au cours de l'année écoulée.
Toutes les chroniques (y compris les inédites) seront publiées - accompagnées de
compléments d'information et de contributions d'auditeurs - en octobre ou novembre
prochain, par les éditions du Cherche-Midi.>
Et pour conclure ce voyage, une dernière petite histoire : Dans un ghetto, il y a
longtemps, le rabbin va voir la guérisseuse et lui dit : « J'ai besoin d'une potion pour
soulager mes rhumatismes. » La guérisseuse écrit quelques lignes sur un morceau de
papier ; le rabbin la lit, il hoche la tête et dit : « Il y a des ingrédients qui ne
sont pas kasher, là-dedans. J'ai besoin d'une potion que je puisse prendre le jour du
shabbat. » La guérisseuse lui répond : « Non, ça je ne peux pas te le donner. C'est
interdit. » Le rabbin insiste : « Mais moi, le jour du shabbat, je fais l'office, je
m'occupe des malades et des mourants, je ne le ferai pas bien si je souffre. Donne-moi la
formule d'une potion que je puisse prendre ce jour-là sans offenser Dieu. »
Et, comme il insiste, la guérisseuse lui dit : « D'accord, mais tu dois me jurer
devant Dieu que tu ne la révèleras à personne. » Le rabbin réfléchit une seconde,
puis il jure solennellement. Le samedi suivant, il monte sur l'estrade et, à haute voix,
lit la formule à tous les fidèles. Pourquoi ? Parce qu'il pense que c'est un moins grand
péché de se parjurer que de garder pour soi un secret pareil. Quand on a accès à un
savoir qui peut soulager ou libérer les autres, on n'a que deux choix possibles : ou bien
on veut garder le pouvoir, et on se tait. Ou bien on partage.
Au revoir tout le monde, et portez-vous bien.
martinwinckler@compuserve.com mw@audiable.com
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( NOTE A L'ATTENTION DES INTERNAUTES CHEVRONNES: Depuis lundi 7 juillet, le lien vers
la page d'Odyssée a été supprimé du site de France Inter. Si vous êtes parvenus
jusqu'ici, c'est que vous avez enregistré l'adresse de cette page dans votre navigateur.
Merci donc de la diffuser aux auditeurs qui ne l'auraient pas, et pourraient croire
qu'elle a disparu. Amitiés, Martin W.
PS : Le 11 juillet, à l'heure d'Odyssée, France Inter a passé un communiqué
intéressant, reproduit ci-dessous:
DROIT DE REPONSE des entreprises du médicament sur France Inter ce jour 11/07/03. Les
Entreprises du Médicament, représentées par le Leem, ont exercé ce matin sur France
Inter leur droit de réponse aux accusations de manquement à l 'éthique portées sur
cette antenne à leur encontre ( cf les chroniques de M Winckler ) . Vous voudrez bien
trouver ci - dessous le texte de ce droit de réponse .
Pour faire suite aux différentes accusations de manquements à l´éthique portées
sur notre antenne à l´encontre des entreprises du médicament, leur représentant , le
LEEM, tient à faire part de son indignation et exerce ici son droit de réponse. A ce
titre, il entend préciser que des affirmations erronées telles que le trucage des
résultats des études cliniques, la corruption des leaders d´opinions de la communauté
médicale, la création de maladies imaginaires, l´utilisation de méthodes crapuleuses
dans les pays du tiers monde, constituent des accusations sans fondement.
Les entreprises du médicament travaillent en respectant des protocoles mondiaux, qui
ont renforcé considérablement les précautions préalables à l´arrivée d´un
médicament. Sans le respect de ces protocoles, aucun médicament ne peut être mis à la
disposition des patients, dans quelque pays que ce soit. Elles sont en outre encadrées
par un dispositif législatif et réglementaire strict et elles travaillent en partenariat
avec un corps médical responsable, dont l´expertise est reconnue, et qui est soumis à
un code déontologique précis. En niant par exemple la preuve scientifique établie des
médicaments anti cholestérol à la prévention de l´infarctus, on dénie aux patients
le droit à une information complète et exacte.
Ces accusations introduisent donc le doute et la suspicion sur la prescription des
médecins, sur les médicaments prescrits, ou sur la réalité de certaines maladies,
risquant ainsi de mettre en danger la santé des malades.
La campagne radio actuelle des Entreprises du Médicament a pour objectif de rappeler
la réalité de leur contribution à la santé des français, et de les informer sur la
recherche en matière de médicaments. Cette recherche est l´un des facteurs clé des
quinze ans de vie gagnée depuis cinquante ans.
C´est un travail de longue haleine mené, avec des technologies de plus en plus
complexes, par des hommes et des femmes qui sont fiers de servir le progrès
thérapeutique. » (Tout le monde peut consulter ce communiqué de presse officiel sur le
site du LEEM ; il apparaît en pop-up quand on se connecte à cette page:
http://www.leem.org/actualite/presse0_frame.htm)