L'ambassadeur démocrate Chas W. Freeman critique, dans le New
York Times, la politique impériale du clan Bush. Il souligne que Washington tire de
ses alliances une large part de sa puissance. Ainsi, les préparatifs de la guerre en
Irak, en suscitant une opposition mondiale, affaiblissent-ils les États-Unis. Ce point de
vue est confirmé par le discours d'investiture du président sud-coréen, Roh Moo Hyun,
que reproduit The Independant. Considérant que la page est déjà
tournée, celui-ci oublie l'alliance cinquantenaire de son pays avec les États-Unis et
oriente son mandat vers le développement de partenariats régionaux.
Au-delà de la position des États qui intéressent les géostratéges, la mobilisation
des opinions publiques fascine les politiciens. Washington doit-il craindre ceux qui
manifestent contre sa politique comme Rome craignait sa plèbe ? Le philosophe
trotskiste Daniel Bensaïd prévient les lecteurs du Figaro que, selon
lui, les manifestations anti-mondialisation et anti-guerre convergeront prochainement pour
renverser le système économique et politique mondial. En écho, dans Gulf
News, le journaliste pro-États-unien Amir Taheri dénonce ces manifestants qui
menacent ses certitudes. Ils ne peuvent être que de gauche et incarner tout ce qu'il
déteste : l'anti-racisme et la liberté de l'avortement.
Le prétexte de la guerre n'est pas encore établi, les hostilités ne sont pas encore
déclenchées que, déjà, les lobbyistes s'activent pour utiliser les événements en
gestation à leur profit. Le consultant pétrolier Rob
Sobhani n'a pas oublié que l'Iran avait été désigné comme cible n°2, après l'Irak,
dans le discours sur l'Axe du Mal. Il se plaint, dans le Washington
Times, des prétentions iraniennes à empêcher les compagnies occidentales de
poursuivre le projet Alov (« Lueur ») sans autorisation de Téhéran. En
juillet 2001, les troupes du président Khatami ont obligé BP et Exxon-Mobil à
interrompre les forages exploratoires qu'ils entreprenaient sous licence du seul
gouvernement azéri dans les eaux communes de la Caspienne. Il ne servait donc à rien de
libérer un corridor à travers l'Afghanistan, tant que l'Iran n'est pas neutralisé et
les ressources de la Caspienne exploitées. Après Kaboul et Bagdad, George W. Bush devra
encore faire un petit effort : il lui faudra attaquer Téhéran.
En qualité de président et idéologue du Center for
Security Policy, Frank J. Gaffney Jr envisage les guerres contre l'Afghanistan, l'Irak et
l'Iran, comme des batailles du « clash des civilisations ». Dans cette
perspective, sa préoccupation première est d'éliminer les musulmans des institutions
états-uniennes. Dans le New York Post, il se
félicite donc de l'arrestation du professeur Sami Al-Arian pour mieux s'interroger sur
les complicités dont ce « terroriste » a pu disposer dans l'administration
pour approcher le président Bush. Poursuivant la « chasse aux sorcières »,
il égrène les noms des collaborateurs musulmans de la Maison-Blanche et du Parti
républicain et demande leur limogeage. |