Le
véhicule du procureur d'État Danilo Anderson (en médaillon), qui venait de convoquer
400 membres de l'opposition soupçonnés d'avoir fomenté la tentative avortée de coup
d'État de 2002 contre le gouvernement démocratiquement élu de Hugo Frias Chavez au
Venezuela, a été pulvérisé par deux bombes, la nuit dernière dans une rue de
Caracas. Les premiers éléments indiquent que le corps retrouvé dans le véhicule
carbonisé serait bien celui de Danilo Anderson, mais étant donné la violence des
explosions, il faudra l'identifier formellement.
À la suite de la publication
par le Réseau Voltaire d'informations sur l'organisation par la Maison-Blanche du putsch
avorté, et à la suite de la mise en lumière de nouveaux éléments par une
association de juristes vénézuéliens, les procureurs Luisa Ortega et Danilo Anderson
avaient inculpé des dirigeants de groupes d'opposition. Ceux-ci auraient bénéficié
d'un soutien logistique et financier de la NED/CIA (1), d'abord pour
préparer le putsch, puis pour mener une campagne de déstabilisation lors
du référendum révocatoire. (forte de 30 000 adhérents et du financement de la
NED/CIA, l'association vénézuélienne Sumate a dépensé sans compter pour réunir les
pétitions nécessaires à la convocation du référendum révocatoire du président Hugo
Chavez. S'appuyant sur un « sondage sortie des urnes »
réalisé par la firme états-unienne Penn, Schoen & Berland Associates, elle affirme
aujourd'hui que le scrutin a été truqué. En effet, les électeurs ayant accompli leur
devoir civique auraient répondu « oui » à 59 % aux sondeurs alors que le
résultat proclamé n'est que de 41% et une erreur de cette ampleur est impossible.
Pourtant les observateurs internationaux agrées par le Conseil national électoral, qu'il
s'agisse de Jimmy Carter, de Cesar Gaviria ou de la délégation du Réseau Voltaire,
attestent de la régularité du scrutin. Certains remarquent que le sondage a en réalité
été commandé par Sumate. Dans le but de peser sur le choix des derniers électeurs et
en violation de loi vénézuélienne, le sondeur avait fait circuler ses estimations par
fax et e-mail quatre heures avant la clôture du scrutin.)
Transmis par Reseau Voltaire
(1) Dans son discours sur l'état de l'Union, le président Bush
a annoncé le doublement du budget de la Fondation nationale pour la démocratie (NED).
Cet organisme a été créé par Ronald Reagan pour poursuivre les actions secrètes de la
CIA en soutenant financièrement et en encadrant des syndicats, des associations et de
partis politiques. Il se flatte d'avoir encadré et manipulé Solidarnosc, la Charte des
77 et bien d'autres encore. Géré par le département d'État en association avec les
partis républicains et démocrates, le patronat et les syndicats, il a trouvé de
nombreux relais institutionnels et individuels partout dans le monde, y compris en France
Au début des années 80 le président Ronald Reagan
stigmatisa l'Union soviétique comme « l'Empire du Mal »
et conçu de nouveaux moyens pour la combattre. À « l'endiguement »
diplomatico-militaire s'ajouta une vaste entreprise de déstabilisation par mobilisation
de la « société civile ». Les actions secrètes de la
CIA ayant été dévoilées par une série de commissions d'enquêtes et ayant été
condamnées par l'opinion publique, le Conseil national de sécurité décida de
poursuivre son action avec des méthodes moins sales et sous une autre dénomination.
Surtout, la nouvelle structure devait être protégée des alternances politiques grâce
à une gestion bipartisane.
Officiellement créé le 6 novembre 1982, la Fondation
nationale pour la démocratie (National
Endowment for Democracy - NED) dispose du statut juridique d'association à but
non-lucratif. Mais son financement est voté par le Congrès et figure dans le chapitre du
budget du département d'État consacré à l'Agence pour le développement international (US Agency for International Development -
USAID). Pour maintenir l'illusion d'une organisation privée, la NED reçoit en outre
des dons de trois associations, elles mêmes indirectement financées par contrats
fédéraux : la Smith Richardson
Foundation, la John M. Olin
Foundation et la Lynde and Harry
Bradley Foundation
La plupart des figures historiques des actions
clandestines de la CIA ont siégé un jour ou l'autre au Conseil d'administration ou à la
direction de la NED, dont Otto Reich, John Negroponte, Henry Cisneros ou Elliot Abrams.
Elle est aujourd'hui présidée par Vin Weber, ancien représentant républicain du
Minnesota, fondateur de l'association ultra-conservatrice Empower America et collecteur de fonds pour la
campagne de George W. Bush en 2000. Son directeur exécutif est Carl Geshman, un
ex-trotskiste, devenu responsable du Parti socialiste des États-Unis (Social Democrats, USA), et membre du courant
néo-conservateur [1].
La NED n'étant que la continuation des actions secrètes
de la CIA par d'autres moyens, le Royaume-Uni et l'Australie sont associés en amont à sa
gestion dans le cadre de l'accord qui lie leurs services secrets militaires.
Le principe de la National Endowment for Democracy est que
« Ce qui est bon pour l'Amérique, est bon pour le monde ».
Les fonds sont donc gérés par un Conseil d'administration où sont représentés le
Parti républicain, le Parti démocrate, la Chambre de commerce des États-Unis et le
syndicat AFL-CIO. Chacune de ces composantes propose des actions qui doivent être
validées à la majorité des deux tiers. Une fois débloqué, l'argent transite par des
instituts contrôlés par l'une ou l'autre des composantes.
Dans la pratique, cela conduit la NED à déterminer des États cibles dans lesquels elle
finance des partis et partenaires sociaux pour renverser des régimes et placer de
nouveaux hommes au pouvoir « dans l'intérêt de l'Amérique »
et non dans celui de l'une ou l'autre de ses composantes.
Créée pour lutter contre le communisme, la NED ne s'est jamais mieux portée depuis que
l'URSS a disparue. Elle prétend promouvoir la démocratie, alors qu'elle ne fait
qu'asservir des États en y reproduisant les intérêts contradictoires de la classe
dirigeante états-unienne. De ce point de vue, la NED est probablement la principale
responsable de la crise des démocraties dans le monde : elle n'a cessé de fausser
les mécanismes institutionnels et d'assimiler la démocratie à une « bonne gouvernance » au nom des peuples et à leur place.
Par ailleurs, l'usage d'instituts marqués d'étiquettes politiques diverses masque aux
yeux de l'opinion publique l'origine des fonds et les mobiles de leur attribution. Dans de
nombreux États, des bénéficiaires de ces « aides » sont
manipulés à leur insu, même si les individus qui ont négocié les versements sont
parfaitement conscients des canaux dans lesquels ils s'intègrent.
Les quatre instituts satellites de la National Endowment
for Democracy sont :
Le Centre américain pour la
solidarité des travailleurs (American
Center for International Labor Solidarity - ACILS). Il est présidé par John J.
Sweeney en sa qualité de secrétaire général de la centrale syndicale AFL-CIO.
Le Centre pour l'entreprise
privée internationale (Center for
International Private Entreprise - CIPE). Il est dirigé par Thomas J. Donohue en sa
qualité de président de la Chambre
de commerce des États-Unis, c'est-à-dire de « patron des
patrons ». [2]
L'Institut républicain
international (International Republican
Institute - IRI). Il est présidé par le sénateur John McCain, rival malheureux de
George Bush aux primaires de 2000 et aujourd'hui principal soutien parlementaire à la
guerre globale au terrorisme.
L'Institut national
démocratique pour les affaires internationales (National Democratic Institute for International Affairs - NDI).
Il est présidé par l'ancienne secrétaire d'État Madeleine K. Albright.
Le système des instituts satellites s'inspire de ce qui
avait été mis en place par les États-Unis, en tant qu'armée d'occupation, en Allemagne
avec la Friedrich Ebert Stiftung, la Friedrich Naunmann Stiftung, la Hans Seidal Stiftung et la Heinrich Boell Stiftung. Aussi,
utilise-t-elle ces fondations comme relais financiers dans ce pays plutôt que ses propres
instituts. Sur le même principe, la NED a trouvé des partenaires dans divers États
alliés, membres de l'OTAN ou de l'ex-ANZUS, notamment : la Westminster Foundation for Democracy (Royaume-Uni), l'International Center for Human Rights and
Democratic Development (Canada), la Fondation Jean-Jaurès et la Fondation Robert-Schuman (France), l'International Liberal Center
(Suède), l'Alfred Mozer
Foundation (Pays-Bas).
À l'occasion de son vingtième anniversaire, la National
Endowment for Democracy a dressé un bilan de son action d'où il ressort qu'elle finance
et encadre actuellement plus de 6000 organisations politiques et sociales dans le monde.
Elle revendique avoir entièrement créé le syndicat Solidarnoc en Pologne, la Charte des
77 en Tchécoslovaquie et Otpor en Serbie. Elle se félicite d'avoir créé de toutes
pièces la radio B92 ou le quotidien Oslobodjenje
en ex-Yougoslavie et une kyrielle de nouveaux médias indépendants en Irak libéré.
La NED publie le Journal of Democracy,
diffusé mondialement, et Encuentro spécialement pour Cuba, ainsi que des livres collectifs.
Elle organise de prestigieuses conférences avec les intellectuels qu'elle sponsorise (par
exemple l'historien François Furet et le patron de presse Jean Daniel pour la France).
Enfin, elle « forme » des cadres politiques et syndicaux,
partout dans le monde, à l'exercice de la « démocratie ».
Officiellement le budget de la NED n'est que de 50
millions de dollars. Mais à cette ligne principale s'ajoutent quantité de co-financement
des opérations qu'elle organise. Ces participations extérieures, d'un montant évalué
à plusieurs centaines de millions de dollars annuels, proviennent principalement du
département d'État et du département du Travail, et avec discrétion de la CIA. |